Dans mon premier billet, à mon arrivée à Marrakech, j’ai abordé l’inévitable impact qu’allait avoir l’élection présidentielle américaine sur la question du climat. Et en effet, dans presque toutes les activités et conférences auxquelles j’ai assisté jusqu’ici, les intervenants sont systématiquement interpellés pour donner leur avis. C’est aussi la première question à laquelle a dû répondre le Premier ministre du Québec en arrivant à Marrakech (à lire dans Le Devoir, quotidien québécois, du 15 novembre : L’élection de Trump donnerait de l’étoffe au Québec).
Chacun se fait assez rassurant et le message tourne généralement autour des quatre points suivants.
• Si des acteurs décident de se replier, aussi puissants soient-ils, ça ne sera jamais assez pour freiner le mouvement qui est actuellement en marche. Il ne s’agit pas d’une simple mode ou d’un feu de paille. Contrairement à ce que l’on peut croire, la lutte contre les changements climatiques, c’est beaucoup plus que la signature de 177 pays au bas de l’Accord de Paris (ce qui n’est déjà pas négligeable !). Rappelons-nous que s’ils ont pris cet engagement, c’est parce qu’ils y ont été poussés par des centaines d’acteurs non-étatiques – des grandes villes, des multinationales, des organismes internationaux, des ONG, etc. – qui sont profondément convaincus de l’urgence d’agir et sont aussi, pour la plupart, déjà en action.
• Vous croyez que M. Trump est le seul à ne pas croire aux changements climatiques ? Détrompez-vous. Ils sont des millions, rien qu’aux États-Unis mais aussi partout dans le monde. Le bouleversement du climat, c’est une vérité qui dérange, tel que le souligne fort à propos le documentaire oscarisé d’Al Gore. Ne perdons surtout pas notre temps à vouloir changer cet état de fait. Demandons plutôt à ces climato-sceptiques d’agir avec nous pour des choses auxquelles ils croient : réduire la pollution de l’air, améliorer la compétitivité des entreprises, développer de nouvelles technologies, favoriser l’achat local, promouvoir des modes de vie plus sain, faire des économies, réduire la congestion routière, etc.
• Le climat a déjà changé et la tendance s’accélère. Les effets sont de plus en plus visibles et les impacts vont s’accentuer, malheureusement. Cela ne convaincra pas les sceptiques, certes, mais cela va tenir les autres en alerte et les forcer à mettre en œuvre les engagements pris dans le cadre de l’Accord de Paris.
• Enfin, c’est une occasion de demander aux leaders d’élever leur jeu encore d’un cran. Que ce soit des personnes, des organisations ou même des États – comme le Québec, la Californie et le Maroc -, ils doivent faire preuve de davantage de détermination. Ils doivent en outre contaminer le monde par leur enthousiasme et faire la démonstration des bénéfices concrets que leur action apporte. C’est ce que demande le Réseau action climat (RAC) au gouvernement canadien dans un article publié dans le bulletin du 12 novembre : Suite aux élections américaines, il est temps que le Canada se montre à la hauteur.
En ce qui concerne le Canada, justement, la délégation menée par la ministre de l’Environnement Catherine McKenna commence aujourd’hui à sortir des salles de négociations et à occuper quelques tribunes publiques dans les side-events. Espérons que le Canada poursuivra sur sa lancée et améliorera son leadership dans la protection du climat. Pourquoi pas une annonce pour dévoiler le Plan d’action canadien de lutte contre les changements climatiques ?
*Citation du titre : Charles A. Beard (historien américain du XXe siècle)