Place to B est à Bonn pour la deuxième semaine de la COP23 ! Pour la première fois, nous sommes accrédités en tant qu’ONG observatrice des négociations. On va donc pouvoir vous raconter de l’intérieur comment se déroule cette COP et ce que les acteurs du climat y négocient. Si ça vous intéresse, embarquez avec nous !
Bula et Bonn
Première chose à savoir, cette COP se découpe en deux zones distinctes éloignées de près de 2 Km sur les rives du Rhin. La zone Bula est celle où se déroulent les négociations. La zone Bonn accueille elle les pavillons nationaux et la société civile : ONG, Collectivités locales, etc. L’espace des négociations est chaque année réservé aux négociateurs et aux observateurs accrédités. Mais, pour la première fois, la zone société civile n’est également ouverte qu’à des personnes accréditées et pas à tous les citoyens.
Cette évolution, ainsi que la grande distance entre les deux zones, ont un impact certain sur le déroulement de la COP. Les négociateurs des délégations nationales ont moins de contact avec les représentants de la société civile. Ils ont moins de chance d’être interpellés ou « exposés » aux discours engagés des acteurs non étatiques. Le « Paris momentum » né avec la COP21 et qui tenait beaucoup à l’implication grandissante et favorisée de ces acteurs auprès des négociateurs, n’est donc plus aussi présent. Certains ont l’impression de retrouver un format plus ancien des COP et qui n’avait pas vraiment fait la preuve de son efficacité…
Négociations entrouvertes
De notre côté, nous nous frottons aussi pour la première fois au programme incroyablement touffu d’une COP. Des dizaines et dizaines de réunions, ateliers et conférences simultanées sur les deux zones. Il faut aussi naviguer, sur la zone Bula en particulier, entre les sessions fermées (où les observateurs ne sont pas autorisés) et les sessions ouvertes, où les observateurs sont théoriquement autorisés mais en pratique ne le sont pas tant que ça.
Un nouveau système de tickets à en effet été déployé pour les observateurs. Ces tickets sont particulièrement difficiles à obtenir selon plusieurs de nos interlocuteurs. Tout cela sans compter que certaines sessions ouvertes se ferment en réalité à la dernière minute à la demande d’un ou plusieurs états ! Si ces sessions fermées sont évidemment négatives en termes de transparence, elles sont en réalité nécessaires au processus des négociations. Sans elles, les états n’avanceraient pas sur les compromis attendus et resteraient sur de simples déclarations d’intentions. Nous risquons donc d’en voir de plus en plus au fur et à mesure de la semaine.
Une COP complexe
Pour certains, l’ambiance de cette COP semble assez lourde. L’optimisme débridé de Paris s’est depuis heurté à plusieurs obstacles. L’actualité depuis la COP22 a plus été consacrée à Trump et son retrait de l’Accord de Paris, aux catastrophes climatiques qui se multiplient et au retard pris sur la diminution des émissions, qu’aux bonnes nouvelles climatiques. La présidence des Iles Fidji est également synonyme de focus particulier sur les nations insulaires. Celles déjà menacées mortellement par les impacts du changement climatique et sur l’urgence de prendre les bonnes décisions.
Or les négociations actuelles sont tout sauf simples. La COP23 doit permettre d’avancer sur les mécanismes précis d’engagements, de financements et de transparence qui traduiront l’Accord de Paris à partir de 2020. Un beau programme. Auquel il faut ajouter un sujet poussé par certains états et que d’autres n’ont pas très envie d’aborder : l’action pré-2020. A savoir, les actions que pourraient prendre les états tout de suite pour engager la transition sur une meilleure voie.
[Fil suivi des négos climat #COP23] Déroulez 🔽
Les négociateurs ont réussi en fin de semaine 1 à progresser sur la plupart des sujets, malgré des échanges compliqués en milieu de semaine, notamment sur la flexibilité des règles entre pays développés et pays en développement.— GERES (@GERES_fr) 13 novembre 2017
Du pain sur la planche
Tous ces sujets sont complexes. Et, au-delà de l’Accord de Paris signé par tous (ou presque, on pense à toi, Donald), on peut voir que les modalités d’application des grands principes restent difficiles à définir. La première semaine a certes permis de progresser sur la plupart des sujets. Avec notamment la préparation de textes rassemblant les différentes options sur chaque question. Mais les points centraux avancent eux assez lentement. On est encore loin d’avoir défini comment seront effectués les bilans mondiaux. Ou comment les engagements nationaux pourront être évalués, comparés et rendus transparents.
Les négociateurs n’ont pas vraiment de marge de manœuvre. Il a été décidé que la COP24 qui conclura 2018 devra arrêter les règles précises de l’action climatique post-2020. Les négociations liées à la solidarité (adaptation, pertes & dommages et surtout financements associés) sont elles-aussi difficiles. Bien que ce soit une priorité pour de nombreux pays en développement. Un consensus sur cette question n’est pour l’instant pas du tout en vue selon les observateurs…
A suivre, les chefs d’état
Les chefs d’état et les ministres devraient pour leur part faire leur entrée à partir de mercredi. On sait déjà qu’Emmanuel Macron et Nicolas Hulot seront présents. Un appel a d’ailleurs été lancé aujourd’hui vers le président français et Angela Merkel. 20 ONG françaises et allemandes leur demandent de mettre le climat au cœur du projet européen. Un appel bienvenu alors que la trajectoire globale de l’Union reste décevante au regard de l’objectif des 2°C. Tandis que les négociations actuelles sur le paquet « énergie-climat » européen ne sont, pour le moment, pas à la hauteur de l’enjeu selon ces organisations. Nous verrons comment les deux dirigeants répondront à cet appel lors de leurs interventions à la tribune !
USA, charbon et nucléaire !
Symbole de cette ambiance particulière, notre première journée à la COP s’est terminée par un sitting et une manifestation chantante. Plusieurs ONG soutenaient bruyamment la justice climatique face à la tenue d’une conférence. Celle-ci était organisée par la Maison Blanche avec les défenseurs d’un « charbon propre » et du « nucléaire pour le climat » sur la zone Bonn.
À la #COP23, grosse action de perturbation de la table ronde des USA sur le « charbon propre » : 2/3 de la salle se lèvent, chantent, bloquent 10 mn et sortent en laissant la salle quasi vide !#ClimateJustice #KeepItInTheGround pic.twitter.com/jLL2wmxoHG
— Partager C’est Sympa (@PartagerCSympa) 13 novembre 2017
On espère que ce premier débrief vous aura permis de mieux comprendre les tenants et les aboutissants de cette COP23 ! N’hésitez pas à nous suivre pendant toute la semaine sur les réseaux et sur le blog pour vous tenir au courant. A demain, on vous laisse avec l’album photo de la journée ! 😊